Le président du parti Renouveau pour la démocratie sociale (RDS) explique son point de vue sur la place de l’opposition sur l’échiquier politique.
Le président du parti Renouveau pour la démocratie sociale (RDS), de tendance sociale-démocrate, explique son point de vue sur la place de l’opposition sur l’échiquier politique, les rôles qu’elle devrait jouer ainsi que la relation entre l’Administration et la société civile.
Fetison Rakoto Andrianirina (F.R.A.) : Tout d’abord, nous constatons avec amertume que l’opposition “officielle” n’existe pas. C’est une situation de fait, car, d’une part, l’opposition est constituée par les anciens dirigeants et ceux qui ont été battus aux dernières élections qui, malheureusement, agissent en ordre dispersé. De l’autre, le pouvoir actuel a omis de clarifier la position et le rôle de cette opposition dans la République. La modification de certaines dispositions de la loi votée en 2011 portant statut de l’opposition n’est pas encore effective. L’opposition parlementaire n’existe pas, alors qu’aucun texte réglementaire ne régit l’opposition “extraparlementaire”. Encore faut-il rappeler que cette loi sur l’opposition, mise en place par le pouvoir de la transition de 2011, a été considérée comme une importante évolution démocratique depuis ces dernières années. Son inobservation risquerait de semer à nouveau le trouble dans notre système démocratique encore fragile.
F.R.A. : Les textes approuvés par les juges constitutionnels sont clairs : ils ne tiennent compte que de l’opposition parlementaire et ne reconnaissent pas les leaders de l’opposition extraparlementaire. La loi, dans sa formule initiale, aurait désigné l’ancien Président Marc Ravalomanana comme étant le chef de l’opposition officielle. Il a accédé au second tour de l’élection présidentielle de 2018, son parti Tiako i Madagasikara (Tim) dispose du plus grand nombre de parlementaires élus parmi les partis d’opposition. Mais apparemment, nos dirigeants ont du mal à se départir de leurs habitudes d’un passé au sein de la transition et ont vite voulu modifier la loi qu’eux-mêmes ont fait voter. Ce qui ne va pas dans le sens d’un apaisement institutionnel. Bien entendu, à défaut d’un cadre légal devant leur permettre de s’exprimer, d’interpeller nos gouvernants et dirigeants, les leaders de l’opposition ont toujours le sentiment d’être censurés, d’avoir leur droit bafoué.
F.R.A. : Je trouve dommage que cette loi portant sur le statut de l’opposition, même dans sa version amendée, n’ait été appliquée. L’objectif était de favoriser le débat démocratique pour permettre à l’ensemble de nos responsables politiques de se pencher réellement sur les vrais problèmes de nos concitoyens. La mise en œuvre de cette loi ne ferait qu’améliorer la qualité des débats et le travail législatif et de contrôle qui – signalons-le au passage – se dégradent ces dernières décennies. Nous traversons une période très difficile, voire critique. La population est fatiguée de cette interminable crise politique instituée, intentionnellement ou non, par les tenants du pouvoir et les opposants. Un décret d’application de cette loi sur l’opposition ne ferait que du bien, car il permettrait aux tenants du pouvoir de défendre leurs acquis et aux opposants d’avoir un cadre devant servir de “défouloir”. Sans cela, la sempiternelle crise reviendrait.
F.R.A. : Beaucoup pensaient que le premier acte de notre tragédie venait de se clore en mettant en place un pouvoir élu démocratiquement à la sortie de la crise politique en 2014, alors qu’il s’est avéré qu’il n’en était rien. Des mesures d’apaisement doivent être prises très rapidement. D’abord, il y a lieu de débattre sur tous les sujets dont les règles morales inhérentes à la vie publique, le rôle et les limites des diverses institutions. Ensuite, il est important de parler du processus électoral dont il faut dès maintenant définir le cadre et les étapes. Ces derniers doivent être en adéquation avec les prérequis démocratiques et les aspirations les plus légitimes de la population. Il est vrai que la mise en place des institutions appelées à traiter le processus électoral, la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), est prévue par la Constitution. Cependant, l’administration n’a daigné faire un effort pour apaiser l’opinion. Une suspicion de corruption électorale est à craindre. Pour briser le cycle de cette crise, à titre préventif, le Conseil du fampihavanam-pirenena malagasy (CFM) doit désormais intervenir. En tant qu’organe constitutionnel, le CFM peut organiser une sorte de concertation rassemblant l’Administration, l’opposition et la société civile pour discuter de la manière de sécuriser le processus électoral et de le rendre transparent. Nous pourrions également consulter, à l’occasion, nos partenaires techniques et financiers, entre autres l’Union européenne, le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), les organisations régionales…
F.R.A. : Premièrement, il faudrait un changement : quelqu’un de nouveau devrait prendre le relais pour avoir une alternance démocratique à Madagascar. Deuxièmement, le système électoral à Madagascar devrait aussi changer pour que le peuple ait confiance aux consultations et que le processus électoral soit entièrement transparent et clair : de la propagande à l’utilisation des fonds de campagne. Durant les élections, la loyauté, la transparence et la clarté devraient être les valeurs essentielles. Les résultats devraient être transparents, car d’eux dépendra la confiance au Président élu. Du côté des opposants, il faut arrêter de gaspiller du temps et de l’énergie en débattant sur les différences de points de vue. Si le Président Andry Rajoelina compte rempiler pour un deuxième et dernier mandat, il lui faudrait instaurer un contexte d’apaisement devant lui permettre de mettre en œuvre son ambitieux programme. Il doit prendre conscience du risque suicidaire qu’induisent le ressentiment et l’accaparement du pouvoir. S’agissant de l’alternance démocratique, j’estime qu’il est désormais légitime de penser à une nouvelle alternative au pouvoir. Madagascar ne manque pas de femmes et d’hommes déterminés et convaincus, capables d’apporter une nouvelle vision et de trouver des solutions communes aux divers enjeux.
F.R.A. : Il est essentiel que la Haute cour constitutionnelle (HCC) et la Ceni prennent leurs responsabilités pour qu’un environnement électoral transparent et sans fraude puisse être instauré. Je constate que la population malgache commence à comprendre que ce ne sont pas les personnalités ou les personnes qui comptent, mais les idées dans le sens du changement.
F.R.A. : Les organisations de la société civile défendent les intérêts des citoyens. Elles interviennent dans plusieurs domaines et émettent des remarques auprès des institutions sur des sujets de société. Leurs membres ne sont pas des opposants. Ils font juste leur travail pour le bien-être du peuple malgache. Penser ainsi est une méconnaissance totale du rôle de la société civile dans une République. Par définition, elle agit comme des groupes de pression pour influencer les politiques gouvernementales en faveur de ce qu’elle est censée représenter : la société. Quel que soit le pouvoir en place, la société civile apporte ses critiques et ses observations dans l’intérêt du plus grand nombre. En tant que premier responsable du parti RDS, je ne peux être que favorable aux actions de la société civile, car elles permettent d’avoir une sorte de balise dans la conduite des affaires de l’État.
F.R.A. : Le chef de l’opposition est prévu par la Constitution. Ce rôle devrait être dévolu à Marc Ravalomanana qui a accédé au second tour de la présidentielle, même s’il n’a pas été élu.
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